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Le Salon du blog culinaire s’ouvre à Bruxelles

Le Soir - M.V.
/ 20.06.2011
C’est le monde à l’envers, confie Philippe Loyen alias Philou, pseudonyme qu’il utilise sur son blog. Avant, je mettais mes recettes en lignes pour quelques internautes passionnés de cuisine, désormais je suis contacté par des grands chefs pour participer gratuitement à des ateliers. »
Idem pour Apolina dont le blog est consacré à la cuisine indienne. « J’ai récemment été invité par Electrolux afin de tester The Cube, le restaurant éphémère qui se situe sur le sommet des arcades du Cinquantenaire. D’autres marques me rémunèrent si j’accepte d’écrire des billets sur leurs produits », explique-t-elle.
Il a suffi de quelques années pour que la blogosphère belge sorte de l’ombre, aidée en cela par la visibilité supplémentaire que lui a conférée Facebook.
Désormais, agences de communication, chefs et marques de l’agro-industrie suivent avec attention ce petit monde qui évolue sur le Net. Chef Damien, fondateur de « 750 grammes », le blog français à la base du salon de Bruxelles, l’explique : « Les blogueurs sont aujourd’hui les prescripteurs d’une large communauté. »
Engouement généralisé de l’époque pour la nourriture oblige, les blogs culinaires se sont taillé une belle visibilité dans la jungle de la Toile. Il est loin le temps où ces passionnés de cuisine – qui se distinguent par une grande mixité sociale et générationnelle – se contentaient d’alimenter leurs blogs de billets sporadiques et d’images approximatives.
Aujourd’hui, l’ambition est de figurer au classement Wikio, le site de référence qui établit un palmarès des blogs francophones selon une logique pas évidente à comprendre.
« Avec la montée en puissance du phénomène, décrypte Philippe Doyen, tout le monde s’est pris au jeu, il y a une véritable émulation. Pour exister, il faut désormais non seulement poster ses billets avec régularité, proposer des photos qui ouvrent l’appétit et également se montrer sur les blogs des autres pour montrer qu’on existe. L’investissement en temps et en matériel est loin d’être négligeable. »
En quatre ans, on a dû approximativement passer de cent à mille blogs culinaires… « Si l’on veut continuer à être présent, poursuit Philou, il faut être au four et au moulin, entre l’invention, la réalisation et la rédaction des recettes, les retouches d’images ou le suivi des questions des lecteurs (NDLR : les blogueurs appellent les internautes qui fréquentent leurs sites des « lecteurs »).
Ce dernier point est crucial, le suivi c’est ce que les lecteurs viennent chercher dans les blogs et qu’ils ne trouvent nulle part ailleurs, ils font confiance à la personne qui est derrière l’écran. S’ils n’arrivent pas à reproduire votre recette, le lien est brisé et vous êtes sanctionné aussitôt, ils ne viennent plus sur votre site… C’est ce que l’on peut appeler de la démocratie gastronomique directe. »
Yves Mattagne parrain
Dans ce contexte, le premier Salon du blog culinaire belge arrive à point nommé. La présence en tant que parrain du doublement étoilé Yves Mattagne, chef qui n’est pas du genre à gaspiller son temps, en dit long sur la considération portée à ce réseau de blogueurs. Officiellement, l’événement – qui n’est pas ouvert au grand public – a pour ambition la transmission des recettes, des petits trucs et des bons fournisseurs par le biais de 44 démonstrations et d’une série de rencontres.
« La communauté d’une centaine de blogueurs belges et français présents passera du virtuel au réel », commente Chef Damien. Sans aucun doute, mais une autre ambition se laisse deviner en filigranes : fédérer et renforcer l’image de la blogosphère belge qui se tient loin derrière les blogueurs français et, partant, lui permettre de devenir un acteur incontournable du monde gastronomique.
A titre d’exemple, un blog français comme 750 grammes emploie sept salariés à temps plein et affiche une fréquentation moyenne de dix millions de visiteurs par mois là où les blogs belges en vue font valoir entre 200 et 1.000 visiteurs par jour. Sans oublier qu’en France, certains blogueurs sont rémunérés par les marques de 500 à 600 euros pour leurs billets, un vrai pactole pour le blogueur belge qui peut espérer tout au plus entre 50 et 100 euros.
Au bout du compte, pouvoir vivre de son blog est la consécration ultime pour ces cuisiniers amateurs qui ont jusqu’ici dépensé sans compter pour leur passion.
A noter
Salon du blog culinaire belge, Autoworld, 11, parc du Cinquantenaire, 1000 Bruxelles. Samedi et dimanche.
www.salondublogculinaire.be