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Mangez les mauvaises herbes cueillies en ville

Sudpresse - S.C.
/ 23.09.2011
L’homme est atypique, certes. À peine arrivé et avant même d’avoir parlé à son auditoire du jour, François Couplan, son chapeau à plumes vissé sur la tête, fonce sur un parterre de fleurs dans lequel il a repéré une mauvaise herbe et... la goûte. Ravi, il fait son entrée tout sourire dans le réfectoire de l’IPES (Institut provincial d’Enseignement secondaire) à Tournai. Ce matin-là, une trentaine de personnes, des guides nature, des animateurs, des élèves d’horticulture, des particuliers aussi sont prêts à récolter de quoi préparer le repas de midi.
Illuminé, François Couplan? Optimiste plutôt et les pieds bien sur terre... les mains aussi, tant qu’à faire! “ L’homme est fait pour se nourrir de plantes sauvages ”, précise-t-il, d’emblée. “ Il y a 10.000 ans, elles étaient la base de notre alimentation. Progressivement, on a fini par les considérer comme subalternes. Et aujourd’hui, le problème n’est pas qu’on ne connaît pas ces plantes, c’est qu’on ne les connaît plus ”.
Depuis des années, François Couplan s’attache à raviver notre mémoire ancestrale, grâce à ses “ balades cueillettes et ateliers de cuisine sauvage ”, comme celle organisée mardi à Tournai. Surprise toutefois: la destination ne sera pas la campagne, mais bien... la Plaine des Manœuvres! “ On peut y trouver tout ce qu’il faut pour notre repas de midi ”, promet François Couplan. “ Et, nous avons vérifié, la Ville n’y utilise plus de pesticides depuis longtemps”. Car se lancer dans la cuisine sauvage requiert des précautions dont celle de s’y connaître suffisamment pour éviter les intoxications. Exactement comme pour les champignons.
Dirigée par François Couplan, la recherche de mauvaises herbes est tout simplement captivante. L’ethnobotaniste s’arrête partout, trouve dans des endroits insoupçonnés (une jardinière, un parterre privé ou une butte peu engageante de prime abord) de quoi nourrir tout son petit monde. “ Ne cherchez pas le nom ”, dit-il à son auditoire. “ Observez, laissez parler vos sens... et surtout, n’oubliez pas que vous êtes en face d’un être vivant. Une plante, c’est cela avant tout! ” Bien sûr, l’exercice passe aussi par la dégustation... avec plus ou moins de réussite. La tanaisie, par exemple, laisse en bouche un sacré drôle de goût qui sème le doute quant à son utilisation future dans “ un cake au chocolat ”, annonce François Couplan. “ Vous verrez, le mélange est génial ”. En chemin, les participants apprennent à goûter: là, une tige, ailleurs une feuille ou une fleur... mais aussi à ouvrir les yeux et surtout à ne pas perdre une miette des nombreuses anecdotes que connaît François Couplan sur les plantes et leurs usages. “ Oui, techniquement, on pourrait ne se nourrir que de plantes
”, confirme l’expert. “ Mais ce n’est pas le but. L’objectif, c’est plutôt de prendre conscience de leur diversité, même en ville. Puis, de faire le point sur ses propres besoins... ”
Les paniers bien garnis, le groupe met ensuite le cap sur les cuisines. Et une petite heure plus tard, passe à table. Verdict de la dégustation: surprenant! Tout ce vert dans les assiettes est original en tout cas. Et à défaut de devenir herbivores, les participants ont appris de quoi étonner lors de futurs dîners. “ Vous reprendrez bien un toast à la tapenade d’orties, elles viennent du jardin ”...